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“La guerre menée par Israël dans la bande de Gaza dépasse les 44 000 morts. Israël a développé et théorisé la hasbara, propagande visant à produire un discours officiel qui valorise les positions et les politiques nationales. Le problème est que les chancelleries et les médias occidentaux ont repris ce discours sans le mettre à l’épreuve des faits.

Malgré les promesses, l’armée israélienne a bombardé des civils, où l’armée leur disait de se réfugier, a imposé un siège destiné à provoquer une situation de famine, et la destruction de toutes les ressources, servant à maintenir en vie la population, dont les hôpitaux.

Dans les rédactions de nombre de grands médias occidentaux, des éléments de langage ont été imposés, comme certains journalistes.

Au New York Times, on demandait aux journalistes de ne pas utiliser les mots « Palestine », « territoires occupés » et « camps de réfugiés », cette expression devant être remplacée par « quartiers ». Le consentement se manifeste de 2 façons.

Passivement, par exemple en se taisant sur les massacres des Palestiniens ou en ne votant pas une résolution des Nations unies demandant un cessez-le-feu à Gaza. Mais ce consentement s’est aussi accompagné d’une répression de celles et ceux qui rappelaient l’histoire qui avait précédé la tragédie du 7-Octobre et permettait d’en comprendre la violence, ou même qui demandaient simplement la recherche d’une paix juste et le respect du droit international.

On les a accusés d’antisémitisme. Critiquer la politique mortifère d’un gouvernement composé de ministres d’extrême droite, promouvant un suprémacisme ethnoreligieux, violant le droit international et coupable de crimes contre l’humanité est aujourd’hui qualifié d’antisémitisme.

Le sociologue israélien Lev Luis Grinberg affirme que « la résistance palestinienne se trouve prise dans un piège : quand elle utilise la violence, on la réprime, et quand elle tente une négociation diplomatique, on l’ignore ».

Alors que la colonisation de la Cisjordanie s’accélérait en s’accompagnant de violentes attaques contre les résidents palestiniens, que l’asphyxie de Gaza par un siège avait conduit à un effondrement de l’économie locale, qu’une répression contre les protestations pacifiques de la Marche du retour avaient causé des centaines de morts et des milliers de mutilations, et que le gouvernement israélien avait annoncé sa volonté d’asseoir sa souveraineté sur l’ensemble de la Palestine, de la mer au Jourdain, l’indifférence du monde était générale.

L’Union européenne se désintéressait du sort des Palestiniens, les États-Unis déplaçaient illégalement leur ambassade à Jérusalem, plusieurs pays du Golfe signaient avec Israël les accords d’Abraham visant à normaliser leurs relations et favoriser la création d’un grand marché régional.

Quelques mois avant le 7-Octobre, le ministre israélien des Finances et de la Colonisation déclarait que le peuple palestinien n’existait pas. Dans l’année qui a suivi le 7-Octobre, l’armée de son pays s’est efforcée de faire de cette affirmation une réalité.

On dénombre actuellement plus de 44 000 décès d’après le ministère de la Santé de Gaza, dont 70 % de femmes et d’enfants, selon les Nations unies, ce qui veut dire probablement plus de 90 % de civils, puisque, parmi les 30 % d’hommes restants, seule une minorité est membre du Hamas.

Mais ces chiffres sont très sous-estimés, non seulement en raison des milliers de personnes qui sont sous les décombres des bâtiments ou enterrés dans des fosses communes, mais surtout parce que la privation de nourriture, la destruction des hôpitaux, les problèmes d’hygiène, la survenue d’épidémies entraînent un excès considérable de mortalité non visible, notamment parmi les plus vulnérables.

Le coefficient multiplicateur risque donc d’être bien plus élevé à Gaza, et si des enquêtes rigoureuses sont autorisées, il est probable qu’on dépassera les 200 000 morts, soit environ 10 % de la population.”

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https://www.rfi.fr/fr/moyen-orient/20241202-didier-fassin-critiquer-la-politique-du-gouvernement-isra%C3%A9lien-est-aujourd-hui-qualifi%C3%A9-d-antis%C3%A9mitisme?utm_slink=go.rfi.fr%2FwxW&utm_term=RFI&utm_campaign=twitter&utm_source=nonli&utm_medium=social

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