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Alors que Gérard Depardieu fait l’objet de multiples accusations d’agressions et de comportements déplacés, l’actrice française Vahina Giocante brise un silence lourd de sens. Connue pour ses rôles au cinéma et son franc-parler, celle qui a partagé des plateaux avec Depardieu livre une lettre ouverte déchirante, mêlant désillusion, colère et appel à la responsabilité. Dans ce texte publié récemment, elle dépeint un homme qu’elle a admiré, mais dont les agissements, selon elle, ont empoisonné l’ambiance des tournages et brisé des vies. Retour sur un cri du cœur qui interroge autant l’homme que la société.

Un témoignage à charge : entre admiration brisée et révélations glaçantes
Dans cette missive, Vahina Giocante revient sur sa relation complexe avec Depardieu, évoquant d’abord son « admiration folle » pour le comédien, avant de détailler les comportements qu’elle dit avoir observés : mains « sous des jupes de figurantes muselées », humiliations, propos « crasses », et une « domination insatiable ». Elle pointe aussi la solitude et la « détestation de soi » qu’elle perçoit chez lui, liant son attitude à une enfance chaotique. Si elle reconnaît son talent « écrasant », elle fustige sa « lâcheté » face aux accusations et le choix d’un avocat dont les mots « vomissent » la violence. Enfin, elle exprime un soutien vibrant aux victimes et appelle à un sursaut collectif.

Voici l’intégralité de sa lettre :


Cher Gérard,
Cela fait quelques jours que je suis l’actualité te concernant avec une gêne intense, un inconfort profond, et un certain dégoût.
Je t’ai connu il y a longtemps, sur plusieurs plateaux de cinéma et je t’ai admiré follement.
J’ai eu la chance de ne pas faire partie de tes cibles, la chance d’être épargnée par l’ogre, celle de connaître ton paternalisme et ta subtile intelligence. Je dirais même ton extrême sensibilité à la limite de l’intuition animale car tu es cela aussi.
Outre ton écrasant talent que nul ne remet en question car il ne s’agit aujourd’hui pas de l’acteur mais de l’homme, il y a les valeurs… Que reste-t-il des tiennes ?

Et si nous parlions de l’homme… Je l’ai vu de mes yeux, fourrer ses mains grasses sous des jupes de figurantes muselées par la peur et la sidération. Je l’ai vu faire pleurer des techniciennes et des jeunes actrices plus vulnérables, je l’ai entendu gueuler, grogner, susurrer de mes pauvres oreilles toutes les dégueulasseries crasses possibles et imaginables.
J’ai vu un homme se gargariser de la honte et de la terreur des plus faibles et s’abreuver de manière insatiable à toutes formes de domination. J’ai vu des équipes entières prises en otage par la gêne insupportable que ces mots et ces gestes provoquaient.

Gérard, tu vois la provocation comme un art mais c’est surtout un besoin vital d’attention, même si celle-ci doit naître de la peur ou du dégoût. Tu voulais amuser la galerie, mais les rires qui s’échappaient étaient le plus souvent des remparts à l’abject. Des rires de confusion et d’inconfort.
Très rares étaient ceux et celles qui s’autorisaient à être vrais envers toi et qui avaient la force de s’opposer à ton ombre dévorante.

Tu es certainement terriblement seul et je perçois une « détestation de soi », le même dégoût que tu cherches à provoquer chez l’autre.
Je sais que ton enfance fut chaotique, petit tu cherchais le sens de ton existence au milieu d’un père taiseux qui ne s’exprimait que par onomatopées et d’une mère soumise et effacée d’après ce que tu en dis. Et comme un cri désespéré pour recevoir de l’attention, tu as façonné à la manière de Frankenstein, un monstre ! Un monstre sacré à tes débuts puis un monstre prédateur par la suite. Un Gargantua.

Je t’ai observé ces derniers jours avec l’espoir que la noblesse que tu as enfouie en toi et que j’ai entraperçue se réveille et s’excuse de cohabiter avec toute cette violence vulgaire ! J’ai espéré que tes ami(e)s les vrais, te poussent à faire amende honorable et à reconnaître ton ombre avec courage. Car l’amour c’est aussi ne pas laisser ceux que l’on aime se perdre dans le déni et la complaisance.
Tu avais là une merveilleuse opportunité de montrer ta soi-disant grandeur en demandant pardon d’avoir autant détruit, mais je n’ai vu que petitesse.
Tu as malheureusement choisi un avocat tout droit venu des enfers dont chaque mot prononcé n’est que vomi malodorant.
Quel gâchis et quelle violence inutile !

Aujourd’hui je pense à ces femmes courageuses et puissantes qui en plus de tes agressions ont subi l’humiliation, les attaques de ton avocat enragé et ta lâcheté.
Je leur témoigne mon soutien indéfectible et ma tendresse.
Je souhaite ardemment que ce procès contribue à définir plus clairement les contours des limites nécessaires pour redresser notre société défaillante.

Vahina Giocante


ChrissM pour PRODPRESS – Tous droits réservés

Contexte supplémentaire : Cette lettre s’inscrit dans un climat de libération de la parole post-#MeToo, où le milieu du cinéma français est régulièrement secoué par des révélations sur des figures tutélaires. Depardieu, visé par plusieurs plaintes, nie fermement les accusations. L’affaire reste en cours.

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